La gestion des risques en contexte de projet est un sujet suffisamment documenté. Cependant, les risques ne sont pas toujours systématiquement gérés avec l’approche méthodologique recommandée.
Fort de ce constat, nous proposons un tour d’horizon technique sur le sujet : de l’origine aux caractéristiques du risque, nous tenterons d’expliquer pourquoi il est important de gérer correctement les risques de projet, puis nous présenterons de manière succincte la méthodologie éprouvée de gestion des risques du PMI (Project Management Institute).
01. Origines de la gestion du risque
Le risque a toujours existé... partout, en tout temps. Tous les êtres vivants sont conscients de la notion de risque et de son impact sur leur survie, sur leurs projets...
En toute circonstance, individuellement ou collectivement, nous avons développé des réflexes, mécanismes, outils qui se sont avérés, au fil du temps, de plus en plus efficaces pour contrôler le risque. Nous devons d’ailleurs notre survie à notre incroyable capacité à gérer convenablement le risque. De génération en génération, s’enseignent et se transmettent donc les leçons apprises de nos réponses au risque.
La sédentarisation de l’humain dans la préhistoire ou la spécialisation des tâches entre hommes et femmes à une époque plus lointaine ne sont que des exemples parmi tant d’autres qui illustrent bien comment l’humanité a dû gérer le risque pour la survie de l’espèce.
L’apprentissage et l’amélioration continue des processus sont donc des notions intrinsèques à la gestion du risque, les outils et méthodes de gestion du risque étant adaptatifs et évolutifs.
Il faut se rappeler également que les humains ont toujours développé des projets et ont donc dû en gérer les risques. La gestion de projet, en effet, ne date pas d’aujourd’hui : la construction des pyramides d'Égypte, de l'acropole d’Athènes dans la Grèce Antique ou de la cité historique de Tombouctou au Mali, la conquête du nouveau monde par les explorateurs européens ou plus récemment les conquêtes spatiales entre les États-Unis et l'ex-URSS sont des exemples de projets réalisés qui sont là pour nous le rappeler.
Les concepts d’incertitude et de probabilité, qui soutiennent le concept de risque, remontent à plusieurs siècles avec des mathématiciens comme Pascal. Mais c’est véritablement après la Deuxième Guerre mondiale que la gestion des risques s’est modernisée progressivement, plus précisément entre 1950 et 1970, d’abord dans les assurances, puis dans les produits financiers (Dionne G, 2013. Gestion des risques : histoire, définition et critique. pp1-9), avant d’atterrir plus officiellement en gestion de projet autour des années 1980.
02. D’où vient le risque en contexte de projet ?
En réalité, le risque est présent dans TOUS les projets. Il est intrinsèque à la notion de projet et découle de l'interaction entre les objectifs du projet et l'incertitude qui lui est rattachée. D’un côté, les objectifs représentent ce qui DOIT arriver (ce qu'on souhaite voir se réaliser) et, de l’autre, l’incertitude représente ce qui POURRAIT arriver.
Cette interaction établit une infinie de possibilités dont certaines sont appréhendées comme des risques. Il y a en effet plus de choses qui pourraient arriver dans le futur qu'il en arrivera réellement. Et selon le contexte de projet, la culture organisationnelle, le degré de tolérance ou d’aversion individuelle ou organisationnelle face au risque..., la perception du risque variera considérablement.
En fait, les risques sont présents dans tout ce qu’on entreprend. Dès qu’on évoque le futur, le risque est potentiellement présent.
03. Les deux dimensions du risque
Le risque présente deux dimensions : l'incertitude et l’effet sur les objectifs. L’incertitude peut être mesurée en termes de probabilités, alors que l’effet sur les objectifs est mesurable en termes d’impact. En somme, le risque relie l'incertitude aux objectifs.
L'incertitude renferme à la fois des opportunités (qui peuvent aider) et des menaces (qui peuvent nuire). Il faut donc connaître son contexte de projet et le maîtriser.
La décision de mener un projet est généralement justifiée par le rapport objectifs/bénéfices d’affaires. Dès que les bénéfices d’affaires sont supérieurs au risque, on peut accepter le risque. Les projets sont souvent truffés de pièges et problèmes potentiels qui posent des risques pour les projets, mais on y va quand même dès qu’on a la certitude que les bénéfices sont plus significatifs que les risques : les objectifs justifient les projets et on veut bien obtenir des bénéfices avant tout.
Pour paraphraser William G.T. Shedd (John A Shedd, Salt from My Attic, 1928, 63p), n’est-ce pas que le navire est plus en sécurité au port qu’en haute mer ? Et pourtant, ce n’est pas pour demeurer au port que le navire est conçu, il doit braver les mers (prendre des risques) pour rapporter des bénéfices plus importants que les risques de mer.
04. Lien entre incertitude et risque
L'incertitude est partout. Cela est particulièrement vrai dans un contexte de projet car le projet introduit un changement. L’incertitude est différente du risque.
En fait, le risque se définit comme l’incertitude qui préoccupe (c'est-à-dire qui peut influencer les objectifs visés). Par exemple, si nous apprenons qu’il y aura une forte pluie dans 2 mois, il n’y a pas grand monde qui s’en préoccuperait. Mais si nous précisons une date exacte à laquelle tombera cette forte pluie et qu’à cette date il est prévu que le défilé de la fête du village se déroulera en plein air avec des invités de marque, cette prévision météorologique serait alors préoccupante !
En effet, cette incertitude (la pluie pourrait tomber ou pourrait ne pas tomber) fait planer un risque sur l’événement puisque si la pluie venait à tomber vraiment à cette date, il y aurait des impacts.
En clair, le risque est un événement ou un ensemble de circonstances qui, s’il se produisait, aurait un effet sur les résultats d'un ou plusieurs des objectifs du projet.
Il est donc la combinaison de la probabilité de l'événement et de ses conséquences (impacts). C’est ce qui explique qu’on puisse représenter le risque dans un plan cartésien où il dispose :
- d’une abscisse, qui est une valeur donnée sur la droite des X et appelée « impact » (ou effet du risque)
- et d’une ordonnée, qui une valeur donnée sur la droite des Y et appelée « probabilité » d’occurrence.
05. Qu’est-ce que la gestion des risques en contexte de projet ?
Selon le PMBoK, le référentiel du PMI (Project Management Institute), les objectifs de la gestion des risques du projet sont, d’une part, d'augmenter la probabilité et l'impact des événements positifs, et d’autre part, de diminuer la probabilité et l'impact des événements négatifs dans le projet.
Le projet baigne dans un univers d’incertitudes autour de ses paramètres clés (budget, échéancier, spécifications) qui rendent difficile toute prédiction sur leur degré de variation.
Il existe en effet une multitude de risques possibles dans un projet: risques financiers, risques de dépassement de coût, risques de dépassement de l’échéancier, risques sur la qualité de l’extrant, risques légaux, risques humains, risques de communication, risques réputationnels, risques politiques, risques environnementaux ou écologiques, etc. Il est donc important que la gestion des risques soit prise en compte adéquatement dans la planification et la conduite du projet de manière à réduire le plus possible leurs probabilités d’occurrence ou leurs impacts.
06. Pourquoi s’en préoccuper ?
Les projets évoluent dans des environnements contraignants et souvent parsemés de difficultés. Ces contraintes et difficultés sont des sources de risques. La gestion des risques vise à répondre à la question suivante : comment gérer et maîtriser les risques pour les rendre supportables, acceptables ?
Lorsque les risques ne sont pas correctement pris en charge, on court le risque de ne pas voir se réaliser certains résultats ou même tous les résultats du projet.
En réponse au risque, on adopte donc différentes stratégies qui se classent en quatre groupes de réponses possibles : l’évitement du risque, le transfert du risque, l’atténuation du risque et l’acceptation du risque. Ces groupes de stratégies visent deux effets distincts : la protection (contre les impacts du risque) ou la prévention (de la probabilité d’occurrence du risque).
07. Comment gérer les risques de projet ?
Pour gérer les risques, il faut d’abord se préparer par une planification des activités de gestion de risques. Ensuite, on les identifie soigneusement (en utilisant différentes techniques), on les analyse qualitativement, et s’il y a lieu, on fait également une analyse quantitative (dans certains cas seulement), on définit une stratégie de réponse appropriée pour chaque risque puis on la met en œuvre avant d’en assurer le suivi et l’évaluation. Nous reviendrons prochainement sur les analyses qualitative et quantitative du risque de projet.
La bonne pratique en matière de gestion des risques de projet requiert l’usage d’un registre de suivi des risques (un simple tableau Excel suffit généralement) où chaque risque est inscrit avec une évaluation de sa probabilité d’occurrence et celle de son impact ainsi que les actions de réponses appropriées.
Le but du registre est d’avoir un œil constant sur chaque risque et de s’assurer de sa prise en charge jusqu’à la fermeture du risque ou jusqu’à la fin du projet.
Et finalement, lorsque nécessaire, on peut représenter les risques du registre de suivi sur une matrice de criticité du risque (un graphe cartésien également appelé matrice probabilité-impact). Cette représentation graphique permet de mieux apprécier l’ampleur de la criticité générale du projet.
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Bernache Conseil
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